Vous avez certainement déjà vécu une situation où vous étiez préoccupé par quelque chose et au même moment, un événement est survenu qui coïncidait exactement à votre préoccupation vous offrant l’éclairage dont vous aviez besoin. Il s’agit d’un phénomène de synchronicité.
Bien que nous avons tous déjà vécu des coïncidences signifiantes, notre rationalisme nous empêche souvent de donner crédit à ces phénomènes. Heureusement, Carl Gustav Jung, le psychologue des profondeurs, s’est aventuré dans l’irrationnalité de ce phénomène pour lui donner un nom et l’expliquer.
Dans cet article, je commencerai par vous expliquer l’origine et la signification de la synchronicité. Je vous donnerai des exemples concrets et vous préciserai d’où viennent ces phénomènes. Je me focaliserai sur le Yi Jing pour illustrer la synchronicité et je terminerai par un exercice pratique pour savoir comment détecter les synchronicités.
1. Origine du terme « synchronicité »
Le terme « synchronicité » a été inventé par le psychiatre suisse Carl Gustav Jung. L’origine du concept de synchronicité lui vient de la lecture d’un traité de Schopenhauer sur le destin de l’individu. Schopenhauer, fervent déterministe, questionne le rapport entre la nécessité et le hasard dans la destinée individuelle. Il postule que les événements de la vie d’un être humain sont connectés à la fois par un rapport objectif causal et par un rapport subjectif éprouvé par l’individu.
Ce sont ces réflexions de Schopenhauer que Jung développera en mêlant considérations psychologiques et philosophiques. En analysant les processus inconscients de ses patients, Jung a observé de nombreux phénomènes de synchronicité et a étudié les conditions psychiques auxquels ils ont liés. Il se pose aussi la question de la coordination entre les processus psychiques et physiques dans l’être humain.
Mais revenons sur les différentes notions en jeu. Le principe de causalité est un principe philosophique et scientifique qui exprime la relation de cause à effet, c’est-à-dire que tout effet a une cause. Il s’agit de la manière dont nous nous représentons le lien entre deux événements consécutifs. La causalité signifie le fait que tout phénomène a une cause. Notre nature occidentale cherche, en effet, une raison à toute chose.
Mais Jung a observé que certains phénomènes sont liés entre eux sans qu’il n’y ait aucun lien causal. En étudiant l’inconscient, Jung rencontrait sans cesse des connexions qui ne pouvaient pas non plus être expliquées par le hasard. Il s’agissait de coïncidences qui présentaient un sens. Deux ou plusieurs phénomènes peuvent donc être simultanés et reliés par le sens. Il a alors choisit le terme de synchronicité pour poser un principe explicatif et complémentaire à la causalité.
2. Définition de la synchronicité
Un phénomène de synchronicité se présente lorsqu’un contenu inconscient arrive à la conscience et au même moment, un fait objectif vient coïncider avec ce contenu psychique. Cette coïncidence peut être troublante pour celui qui observe ce phénomène et apporte alors une signification particulière à la situation.
La synchronicité peut donc être définie comme la coïncidence signifiante entre un contenu psychique subjectif et un événement physique objectif.
Jung classe les phénomènes de synchronicité en trois catégories :
- La coïncidence entre l’état psychique de l’observateur et un événement extérieur simultané.
- La coïncidence entre l’état psychique de l’observateur et un événement extérieur qui est éloigné de l’observateur dans l’espace.
- La coïncidence entre l’état psychique de l’observateur et un événement extérieur qui est éloigné de l’observateur dans le temps.
Dans les deux derniers cas, l’événement extérieur est anticipé et ne peut être confirmé qu’ultérieurement.
La synchronicité est un concept qui exprime le fait que des coïncidences signifiantes se produisent. Celles-ci sont dues au hasard mais elles sont tellement improbables que Jung suppose qu’elles procèdent d’un principe équivalent à celui de la causalité. Le seul lien qui existe entre ces phénomènes est de l’ordre du sens.
En résumé, lorsqu’un contenu psychique peut être représenté par un événement extérieur simultané, le hasard peut présenter un ordre signifiant et tout se passe comme si une cause avait été à l’œuvre.
3. Exemples de synchronicités
Pour illustrer ces explications abstraites, voici trois exemples concrets de synchronicité.
L’exemple que Jung donne de la première catégorie de synchronicité est celui du scarabée d’or. Jung se trouvait en consultation avec une patiente qui lui expliquait un rêve lors duquel elle avait reçu en cadeau un scarabée d’or. Au même moment, Jung entend un bruit à la fenêtre et voit un insecte volant qui ressemblait au scarabée doré. Il le prend et le montre à sa patiente en lui disant : « Le voilà, votre scarabée ».
La patiente se situait à un moment décisif de son analyse et était bloquée par son rationalisme. Cet évènement irrationnel provoqua une ouverture chez elle, rompant sa résistance intellectuelle. Grâce à ce phénomène synchronistique, le traitement de la patiente se poursuivit avec succès.
Pour la deuxième catégorie de synchronicité, Jung donne l’exemple du scientifique et philosophe suédois Swedenborg qui possédait des facultés de clairvoyance. Pendant le grand incendie de Stockholm de 1759, Swedenborg se trouvait chez des amis à Göteborg et relata l’incendie dans tous ses détails. Ses descriptions relatives à l’incendie s’avérèrent exactes.
En ce qui concerne la troisième catégorie de synchronicité, Jung prend l’exemple d’une femme qui lui raconta qu’à la mort de sa mère et de sa grand-mère, un essaim d’oiseaux s’était assemblé devant les fenêtres de la chambre de la mourante. Jung envoya son mari chez un spécialiste pour des examens en raison de symptômes. Lorsque le mari partit pour la consultation, des oiseaux se rassemblèrent autour de la maison. La femme pressentit le pire : la mort de son mari qui survint au retour de sa consultation.
4. D’où viennent les synchronicités ?
Jung a observé que les phénomènes de synchronicité apparaissent lorsque qu’un archétype est activé. Les archétypes sont des images primordiales qui expriment des contenus de l’inconscient collectif. Ces archétypes structurent la psyché, ce sont des types de comportement qui se manifestent par des émotions intenses. L’archétype est en quelque sorte l’aspect formel des émotions instinctives.
Lorsque nous sommes en proie à un conflit intérieur et que nous n’y voyons pas d’issue, des archétypes apparaissent dans nos rêves ou dans notre imagination. Ces archétypes nous révèlent une possibilité de progresser à laquelle nous n’aurions pas pensé. Notre inconscient, en activant un archétype, nous indique la voie à suivre pour débloquer notre situation.
La présence d’un archétype dans un rêve favorise l’apparition de synchronicités. Une émotion, comme le conflit intérieur, provoque un affaiblissement de la conscience et offre l’occasion à des contenus inconscients de s’exprimer. Des événements parallèles ou des perceptions extrasensorielles peuvent alors se manifester et donner du sens à notre conflit. Avec l’émergence de contenus inconscients, des événements subjectifs et objectifs se produisent simultanément pour faire sens.
Lorsque ces contenus psychiques inattendus surgissent, comme des symboles de renaissance, ils sont le signe que nous sommes prêts à retrouver un nouvel équilibre dans notre vie. Grâce à l’activation de l’archétype, de l’ordre émerge dans notre conscience, nous offrant ainsi la possibilité de résoudre notre conflit intérieur. C’est donc l’apparition simultanée d’un contenu subjectif, l’archétype, et un événement extérieur, qui donnent du sens à notre situation.
Dans le premier exemple, le scarabée d’or auquel la patiente a rêvé est un archétype, un symbole de renaissance. Le récit du rêve a coïncidé de manière signifiante avec le vol de l’insecte. La simultanéité du contenu psychique avec l’événement extérieur a ainsi permis à la patiente de débloquer sa situation.
5. Le Yi Jing et la synchronicité
Le Yi Jing est un des textes fondateurs de la civilisation chinoise, le Classique des changements. Cet ouvrage constitue la base de la pensée chinoise avec l’articulation des principes Yin Yang sous la forme d’un oracle. Mais le Yi Jing est plus qu’une technique divinatoire, c’est une méthode d’exploration de l’inconscient et de connaissance de soi.
La méthode consiste à poser une question et à procéder à un tirage dont le résultat repose sur un des 64 hexagramme du Yi Jing. Le tirage se fait en partageant 49 tiges d’achillées ou en lançant 3 pièces de monnaies qui donnent un hexagramme composé de 6 traits Yin et/ou Yang. L’interprétation se fait sur base des commentaires du Yi Jing.
Le Yi Jing – comme toute méthode mantique – repose selon Jung sur le principe de synchronicité, c’est-à-dire qu’il existe une correspondance entre la disposition psychique du consultant et l’hexagramme tiré. L’hexagramme représente l’état intérieur du consultant à travers une situation extérieure. Il donne une image de la situation énergétique qui correspond à l’état psychique du consultant. Il existe donc un parallélisme entre l’événement psychique et l’événement physique, entre la disposition psychique du consultant et le moment énergétique du tirage.
L’interprétation de l’hexagramme exprime l’inconscient du consultant et fait apparaître une signification souvent inattendue. En tirant le Yi Jing, nous obtenons étrangement une réponse à ce que nous n’avions pas pu voir seuls. L’oracle attire notre attention sur un aspect de la question auquel nous n’avions pas pensé, il nous fait changer notre point de vue. Il peut ainsi nous être utile dans notre processus d’individuation et dans le développement de notre personnalité.
Pour pouvoir interpréter le Yi Jing, nous devons tenir compte de la question posée mais aussi comprendre le symbolisme exprimé dans les commentaires. Comme pour l’interprétation des rêves, l’interprétation de l’oracle nécessite des connaissances en psychologie de l’inconscient, et notamment de compréhension des archétypes. Ce qui complique encore les choses, c’est que les commentaires du Yi Jing sont issus d’une culture traditionnelle chinoise qui nous est étrangère.
6. Conclusion
Jung a élaboré le principe de synchronicité pour expliquer des phénomènes irrationnels qu’il avait observé lors de ses consultations. Ainsi, des phénomènes simultanés qui ne peuvent être expliqués ni par un lien causal ni par le hasard, peuvent être liés entre eux par le sens.
La synchronicité est une coïncidence signifiante entre un événement psychique et un événement physique. Les phénomènes de synchronicité apparaissent quand un archétype est activité. Lorsque des contenus de l’inconscient collectif émergent, des événements parallèles peuvent survenir et donner du sens à une situation de blocage.
Jung, qui pratiquait la méthode divinatoire, avait à cœur de mettre en avant le Yi Jing comme illustrant le principe de synchronicité. Le Yi Jing est une saisie intuitive de la totalité spécifiquement chinoise qui fait correspondre un état intérieur avec un état extérieur. Cette méthode ancestrale chinoise est pour Jung une science intuitive empreinte de sagesse et dont le but est la connaissance de soi.
7. Exercice pratique
Je vous propose un exercice pour détecter les synchronicités, pour déceler les signes que la vie vous offre pour avancer sur votre chemin, développer votre personnalité et vous épanouir.
Il s’agit d’être attentif à la fois à ce qu’il se passe dans votre monde intérieur et dans le monde extérieur.
- Soyez attentif à ce qu’il se passe en vous, au niveau de votre conscience : quelles sont les choses qui vous préoccupent ? Quelles sont les pensées qui s’emparent de vous ?
- Soyez attentif à vos contenus inconscients : de quoi rêvez-vous ? Quels sont les thèmes qui reviennent dans votre activité onirique ?
- Soyez attentif à ce qu’il se passe autour de vous : au lieu de regarder votre smartphone, levez la tête et observez votre environnement, les édifices, les personnes, la nature…
Portez à présent votre attention sur les liens qui se tissent entre votre monde intérieur et le monde extérieur.
- Voyez-vous des coïncidences ?
- Ces coïncidences ont-elles un sens pour vous ?
Au fur et à mesure que votre attention aux choses s’aiguise, les signes de l’univers se montrent. Vous observerez de plus en plus de coïncidences et lorsque ces coïncidences seront vraiment signifiantes, vous les saisirez et vous comprendrez qu’elles sont là pour vous guider sur votre chemin.
Sources de l’article
- Carl Gustav Jung, Synchronicité et Paracelsica, Albin Michel, 1988
- Carl Gustav Jung, Commentaire sur le Mystère de la Fleur d’Or, Albin Michel, 2021
- Arthur Schopenhauer, Pererga & Paralipomena, Coda, 2010
- Cyrille J.-D. Javary, Pierre Faure, Le Livre des Changements, Albin Michel, 2012
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